L’un d’eux vidait le sac sur la table, visitait les portefeuilles, supprimait les carnets, les papiers, les boussoles, les cartes, les jumelles, les appareils photographiques, les stylographes, les sifflets, les couteaux de poche et les canifs, car tout cela constituait, disaient-ils, du « butin de guerre ». Mais la kantine vend des couteaux qui sont des armes plus sérieuses que nos canifs. On nous avait confisqué nos couteaux de poche et jusqu’à nos canifs, sous prétexte que c’étaient des armes et donc du butin de guerre. Il renonça, et, se levant pour un dernier coup de collier, il n’eut assez de ressort que pour arriver jusqu’à une ferme. La kantine fournissait des violons, des flûtes, et jusqu’à des cithares dont on pouvait jouer sans initiation aucune. La kantine était ouverte du matin au soir tous les jours. La kantine n’est ouverte qu’à certains jours de la semaine et à certaines heures. Le camp de Mayence n’est qu’un camp de passage pour beaucoup. Mayence m’avait prédits, la kantine étala un riche assortiment d’outils de toute sorte, pour travailler le bois, la glaise, le fer, l’étain, le cuivre. Mais la kantine vend des cartes allemandes.

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Il me promit la terre et la lune ; mais, comme il aperçut que je possédais un exemplaire de la Germania de Tacite, acheté à la kantine de Vôhrenbach, il se retira assez précipitamment et tout le monde avec lui, y compris les deux Schwester, la petite, qui souriait, et la grande, qui était renfrognée. Il parle aux Allemands avec un sans-gêne incroyable, il rudoie ce hurleur de Latrinen, lui obéit quand ça lui plaît, discute tous ses ordres et crie plus fort que lui, ce qui n’est pas peu dire. Le tirage n’est pas aisé mais pour aller loin, il faut battre de grandes équipes. Rien n’est impossible ici. Pourtant ce poste est aujourd’hui indispensable. Le poste de police sortait de sa baraque et lançait immédiatement des patrouilles dans toutes les directions. Curieux personnage. Grand, souple, figure émaciée avec des yeux vifs, vêtu de la tenue des soldats prisonniers, c’est-à-dire de n’importe quoi pourvu que le pantalon et les manches de la veste portent une bande tracée à la peinture rouge, coiffé du bonnet de police noir et bleu qu’orne un gland qui se balance, le Belge est un type d’arsouille qui plaît et déplaît en même temps. Ils nous racontent leur misère, qui est tragique, leur faim, les mauvais traitements qu’ils ont à subir pour la moindre peccadille.

Hier, à l’examen de nos sacs, on nous avait retiré un jeu de cartes françaises qui servait à l’éternelle manille de quatre officiers. L’examen des vingt-deux sacs fut long. Il eut beau nous compter une fois, deux fois, trois fois, comme le règlement le prescrit, et recommencer à nous compter, et compter et recompter les morceaux de pain de la journée : il n’en trouvait plus que vingt et un, et il était certain d’en avoir pris vingt-deux à la cuisine. Quoi qu’il en soit, le Belge est un homme dont nous avons besoin, et, tout en demeurant circonspects, nous écoutons son bavardage. Il a un col boutonné avec des détails de la marine, ce qui est réfléchi par une garniture de la même couleur à la fin des manches. Un feldwebel entre, une lanterne à la main. Les manches ont une partie blanche puis noire. Il était minable et travaillait dans une ferme voisine. Demain soir, il n’y aura peut-être plus personne dans la chambre no 28. Nous serons tous peut-être, demain soir, des prisonniers comme les autres au milieu des autres. ’une toge. L’ordonnance belge se trouvait à point nommé dans la chambre pour nous renseigner.

Mais aujourd’hui nous sommes moins nombreux dans la chambre. La veillée reprend, lugubre, dans la chambre mal éclairée. À 9 heures du matin, l’homme de Hansi, vieillard à lunettes avant l’âge, fit sa deuxième apparition dans l’embrasure de la porte, et sa voix consciencieuse et mal assurée nous lança le nom du deuxième officier qui quitterait le saloir. Nous avions espéré que nous subirions tous aujourd’hui l’interrogatoire qui nous délivrerait de la quarantaine. D’ailleurs, j’allais l’oublier, il ne nous rendait pas intégralement la somme allemande à laquelle nous avions droit. Il prononçait lentement les phrases françaises dont il n’avait que peu d’habitude, il n’avait pas toujours l’air de comprendre ce qu’il lisait, et il mettait à chaque mot un accent tonique si marqué que les plus découragés d’entre nous se mordaient les lèvres pour rester sérieux. Car, en même temps que nous, on interroge aussi peu à peu les capitaines et même les officiers qui sont arrivés hier. Cependant, l’ordonnance belge refrène un peu notre espoir. Cet espoir se réalisa pour plusieurs. Il n’y a rien là qui doive nous émerveiller : l’Allemagne est une nation de commerce, et tous les moyens lui sont bons pour trouver des clients. Car il ne faut pas croire que le Gouvernement Impérial et Royal nous fit cadeau de ces choses, comme don de bienvenue.

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